• Homard m’a tué.

     Gedicus


    Alors quoi ? Peuvent plus se gaver tranquillement nos politicards ? A quoi ça sert qu’ils se décarcassent pour gravir les échelons escarpés vers le trône suprême si c’est pour ne pas en cueillir les fruits ? A quoi ça rime d’être logé dans un palais de la « république » si on ne peut pas y inviter les copains et en déguster les grands crus ? On comprend bien que la préservation de la façade éthique d’un gouvernement qui ne cesse de demander à ses citoyens de se serrer la ceinture et se permet de leur donner sans arrêt des leçons de morale implique de prendre quelques mesures pour sauver les apparences. Surtout à l’heure où les Gilets Jaunes se lassent d’être condamnés aux pâtes au riz dès le début du mois et se mettent à chanter, comme Ravachol montant à l’échafaud en 1892: Tandis que ces messieurs, nom de dieu, s’arrondissent la panse, sang dieu ! Nous crevons d’abstinence, nom de dieu ! Il faut faire peuple*, en effet, comme le note judicieusement un éditorialiste, pour ne pas trop énerver les jaloux privés de brioche et de homards.

     Mais, là, ça va trop loin. On ne peut pas non plus demander aux responsables politiques désignés par la souveraineté nationale de loger dans des tentes sous les ponts du périphérique et de manger des hamburgers avec des frites tous les jours, remarque lucidement le Riss de Charlie Hebdo**, toujours pertinent. Un tel régime, c’est bon pour les gueux, les « sans dents », la racaille.

    Il faut vite dénoncer cette dictature du moralisme, cette inquisition que le même Riss voit arriver dans la foulée. Dame, on n’est plus en 1849 quand le député Martin Nadaud osait se présenter au parlement dans sa blouse de maçon. Aujourd’hui on pourrait bien se faire offrir quelques costumes de luxe sans encourir la fureur populaire, ou faire aménager un peu son garni aux frais du contribuable sans devoir s’en justifier, même si on en sort le plus souvent blanchi. Et dîner au Fouquet’s, puisqu’il est de nouveau ouvert.

    Sinon, vous verrez que cette inquisition va finir par confirmer l’intuition d’un député : on va se dire que  ça ne vaut pas le coup de s’engager en politique,*** c'est-à-dire, plus précisément, que ça ne vaut pas le coup de se lancer dans une carrière de démagogue décomplexé. 

    Et c’est peut être ce qu’ils veulent ces dictateurs de la transparence : Faire tomber  l’aristocratie politicarde, la monarchie « républicaine » et les copains et coquins qu’elle sert grassement.

     

    Gédicus, 27 juillet 2019

     

    *Stephane Vernet, Ouest France, 26 juillet 2019.

    **Charlie Hebdo, N° 1408, 17 juillet 2019.

    *** Laurent Saint-Martin, Le Monde, 19 juillet 2019.

     

     


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