-
Les ombres erratiques (Patrice Thierry)
I
CARQUOIS BAROQUE DES SENTES
La ruche des monts semblait miellée sous les abeilles d'un soleil perclus d'élans brisés la vapeur scintillante des pluies amantes en cette saison.
Le torrent crayonnait ses ombres à la feuillée des neiges, soupirant d'alanguis séjours aux pierres forcées de truites. Mais combien de coudées meurtrissantes avant d'atteindre les champs de nos villages.
En aval de l'île glotte qu'habitait l’enfantillage un pont gallo-romain s'échinait sur une gourgue trou brassant fort l'eau qui fustigeait sur un millier de pas la nuque des rocs et l'espace même.
A dextre venant du calvaire des pierres agencées par décision humaine formaient une grotte que cicatrisait une grille.
Une vierge dont c'était la niche veillait du moins regardait le pont. Vierge qu'un mouton caricaturait de sa présence difforme. Le lavis de son visage n'éclairait la pâleur et le cassé de son habit marron en son bas tel un soc embourbé.
Depuis bien des lustres une pensionnaire de l'hospice venait régulièrement changer les fleurs mises là au pied de la catholique moulure en une boîte de conserve ondulée ainsi qu'en un pot de confiture.
L'été chaque matin elle venait du village fort éloigné au lieu à fleurir.
2
Couché à l'heure où les mouettes quittent leurs îles pour rejoindre le sillage des navires.
Bien après la nuit et son troupeau de sommes je restai sur ce lit un muscle froissé d'un vol hirsute j'en boiterai bien des jours malgré l'application d'un topique.
Je revoyais ma vie comme un enfant visitant un grenier découvre tout un théâtre à mettre en scène les échelles du songe montaient haut.
Vint quelque bruit de l'escalier signe d'éveil faisant fi de mon pacte avec les moutures du reître aux farineux drapages. La crainte alors contre ce qui avait été convenu la veille que l'on vienne frapper à la porte afin de me rendre à une autre réalité.
Malaise de devoir dire à ces inconscientes tubulures « Peut être pourrais-je revenir jouer avec vous » ?
Et l'orgue maligne donna du vent en ces rictus de cataracte.
3
J'allais retrouver la pauvre dame le corps ployé à terre gisant par moitié en une eau cascadant au long du chemin telle la suavité des proches peupliers...
Décédée autant de peur que de la morsure du reptile fort venimeux au demeurant en cette contrée d'humide chaleur qui s'était lové derrière la vierge.
La montagne reflétait le visage de l'errance. Sombre ou blanche s'effrangeaient de tragiques tumeurs marines. Moutons que guettait l'ours roux des mouvances de l'aurore.
4
Un passage se créa parmi les nuages. Les dents du cirque se transformèrent en castels de lumière sur un horizon pourpre cendré.
Des moustiques en potence d'aiguillon vinrent avec le jour crépusculaire.
Orchydée sous nos mains glissant aux orties.
5
Je n'ai l'espérance des branches au licol du fusain et l'argentier du torrent n'est que granit soudoyé. Les parfums pourtant en rotation suivent les fluteaux à l'auspice du papier. Au fourneau des dérives les fêtes retournées d'un relief hissé des teintures.
Viduité clarté cillante et douce tapie voisine endogameles grêles se lovent et gravent se tordant
l'atour mouillé des harmonies
Phare hérissé au rut maliquechutant le toit d'un trait
se mue l'aurore dolente des sexes voguant seuls
Passé l'orage ardant des masques
diapré en de torves soupirs
Mouches et graves roulis des seins
glisse a l'exagérence du dos
le pli des avalaisons frénétique mouillage au tamis convulsif
des sourires dévastés perpétués dans la stridence des sorts dévoués
Inlassable le vol noir d'une moelle sidérale cascade et goutte au bûcher torve de I'œil gémissant les murmures perplexes agrippés au gréement des phalanges rets de sang voués à la ronde du totem
Dauphin des constellations le bulbe au pollen des ressacs agite le destin des croissances détachées carapace tombée des amulettes du trapèze
S'emmurent somnolentes les musiques poissonneuses d'un quatuor
Labyrinthe squamé silence hagard des murailles
Les frontières aux couteaux entravent les horloges illégitimes
Obscurantes fougères s'infusent les plats colériques
Crevasse frangée d'un souffle de résine urine poisseuse des refletsLa tentation d'un embryon copulatif Les bourbiers s'entaillent d'éclatantes voyances sous l'accouplée favorisant l'amertume de l'ellipse Larme inclinée en véloces scories de terre Magnifiée
Désirée
Possédé l'émotion suave vertige de ton onctoyante mouvance à la plénitude des fontaines fructifie le rosier des captifs désole toute voracité de langueurs précieuses
les poussières dévalent telle une liste noire des excès de la raison
6
La vallée guette d'un sommeil canin et favorise le pas d'un cil boueux sur les pores d'une gravure en semence
La nuit est courbe aux lumières genuflexées
Les séditions jointes à l'étoile improvisent un fortin qui frissonne des minuits dissipés
Déliés les cauchemars sillonnent le triangle du front fendu de fétide infortune
Blessure retorse
en la cuvette du végétal
Cime submergéeaux entrailles du rêve
Flamboyance bosseléeaux racines voraces
L'épervier des cuissesaux cornes frémissantes
Fourmillière d'un stellaire entachéirisée d'une lune aux fers
Feuillé de caresses guêpes méconnaissantes de l'horizon le chevalet aurifère la grotte d'un grain palpitant ventriloque sertissant d'épines l'échelle d'une panse tempétueuse
Crépitant Rapace Fécond Blessé Dilaté à la nuit...infus retrouver le miel du hameau
7
Le chemin s'épanche en la haute terreune patte d'aigle sculptée au suspens des proies
A la vasque du tocsin les lèvres inclinées aux versets des graminées dénoueront ton somme le front à la pierre ton esprit s'infléchira à la harpe du verger des pénombrestelle une chevelure défaite l'onde cachera les seins de ces frises nues au lustre des rhyzomes
tu porteras sur les dallages alentours le plus mélodieux chant de voyelles afin que plume d'arc cisaille et tresse le poli des colonnes créées en parfaite saillie
Fluviale offre d'une langue à l'ombrage vipérin duquel les mots se dispensent à disposer des succulents brasiers du doute
Aux feintes d'herbe nous découvrons la voluptueuse et presque inaccessible fronce de la mauve
Sise en prestige une nymphe d'un onguent persistant l'a désirée aux vaines stupeurs du dard âpre de midi qu'elle opère sur son faite féérique la migration des victimes écorces d'après les pipeaux puissants d'un son enroulé
En cette mauve ondoyante vers les cimes sept valets
Comme en tous degrés d'excitation contre l'aiguillon de
sombre mine un priapique éclat offrit son baume lascif festoiement d'une cour torturée les heaumes empalés aux humides serments de jouvence
Ointe fut la terre telles ses amères accouchées
La barque lunaire passées les obliques nitescences résista aux miroirs des nacelles du givre s'agréa au rameau de la mauve Elle fit d'une caverne un gouffre adhérant aux baies d'or elle transforma en jardin les perles aux parois salines
Parcourue la sente friable où se nichait fronce d'amulette une virginité lamée de magnitude au brandon de l'aurore
Le poignet de la mauve sous de larges soieries disposait à la bride de sa paume d'un cinématique cinabre
Le carquois vaporeux parcouru de flèches inusitées
II
Givre de la chair au buisson des feuillées
Au couvert de broussailleux habits
Ecorce en suspens
Le pâtre remonte de l'humide des paupières aux brûlures du palais qui festoit de lascives bulles forestières
La corniche des eaux d'angélique diligence encourt la roue des chevaux de ronde égrénant le nommé pays et ses statuaires rétablesles lyres se détachent aux fontaines aiguillonnées
Après les lances il ne restera au lion que plaisante dépouille sourire d'aigle et l'enfant ailé L'arbuste d'aménité prête assise Aromatique faîte tournoiement ardent des tiges
Méandres aigus d'hâtive cuirasse sur l'ire bruissante de roches appelées
Labile aux morsures de myriadiques convulsions
Lcs pourtours saillants de la plaie s'égouttent épinant la louable présence du faon lascivement véture
A l'ombre des écumes taciturne l'aquarium pris en uncorail croissant s'évanouit à l'extrême du verre
Receleuse l'alcove ploie d'un fruste soliloque
Sous la lunaire coupe le rouet des lampes indécises s'enorgueillit alors l'ancien chemin des grottes lancéolé sous le porphyre disposant des nymphes encloses
Les langues élaguent le méditatif vaisseau soupir d'ossement empreint de cyprès aux brisures d'onde apaisée
Des pierres culbutées au squelette du taureauDu tertre en la niche aux dévotions
Le loup noir frissonnera sous la corne
Au sourcil de la coupe vociféraient les cerclesridés de tortueuse souplesse en spirale puis noués vers la soif écaillante
S'apercevait derrière l'étoffe reposée un sein lourd entaillant le geste
Le tourment ceint l'écho de ruisseaux de lumière
Déchirée frémissante embrasement à la vision coite du berceau tu lèves avec tendresse le voile et ses lèvres luxurieuses
Et les fruits ébranlés jaillissent des frontons pour mûrir des clartés consumées
Ferveur de la fuite dans l'attente des montagnes en cours d'ovipare dessein nuageuse caresse douceur des sentiers vers le banquet mémorial
L'abandon sous les douleurs errantes profère l'énoncé des périls échauffés
mais il est un éveil en silencereplis de l'azur qu'interroge l'oiseau
Dispersées les abeilles tremblent d'un écart furtif des baumes
Forcées de richesses elles bourdonnent à d'autres sèves
Humides au long des ombres les grappes effrénées ensevelissent encor le nectar sonore d'antiques téméraires
Idiome ancestral témoin des jubilations d'ordonnance
Evidence de l'abyssal sous les frondaisons inclinéeshanche résineuse poussée
Roides louanges
Il y a autour de ton nom le fléau des tempêtes de toutes car-rières et de toutes forêts s'échinant
le climat des sangs aux hâbleries des oiseaux
Les fables par-dessus les souples brebies égorgées entachent le seuil du palais de la roue
En ton nom les mines sourdes des candides portes à serrure les vapeurs raillant l'inerte des colonnades d'antan chute la courbe
A ta cuisse pastel des formes et de l'arc se délivrent les arbres
et détèlent d'érectiles coagulations
Les bois fruités de l'homme errant ont donné à ton front l'amère commisération du foyer hivernal
le songe des marches crispe l'amoncellement en habitat
Au carcan des fougères mâtiné de rosée s'éveillent les insectes tel un encensoir qu'augure la baguette et le cœur agité
Rien de foutral à souhaiter clore le cercle par le truchement d'un grêle intestine
Cille la fuite à l'attention des poissons de verre
Le fer outrage la cloche aux fontaines dérobée A l'auvent de l'ébauche le larçin des soies exhale un frisson de perles et adopte le charbon croupissant en obscure friche
Ortie de confesse la chair inanime la faute de voir bateler tel un onguent le chapelet morfondu et grelottant
Contorsions narquoises d'une gale qu'enjole la fourbe méprise
L'étouffement combustible des entrailles humides du soupir inspire la lassitude des embryons vermeils les racines déliées
Fortune d'impétrante sagesse ruant sur les bilieuses pituites
Tapis en ambages le long des poussières un rayon atonie d'un fourreau solaire englouti
le fourvoiement des chiens frivoles au feu horloge la portedes expiations
A l'organe rejailli s'approche le souffle
Phénix imprimé dans le panégyrique L'idiome végétant calfeutré des becs se sauvera afin d'attacher à ses griffe sbandées une cervelle obstinée pour la compréhension véhémente des jumeaux
Discours feuillés au concert des faucons Gré des pouliespour ces filets d'une grossesse en cage
larmoyants à la fusion du limon
Trépas du coquillard circonstance du sabbat dans le cours du pinceau
Acharnement désabusé des chariots assujettisfruitière usure
Rixe engloutie dans l'éclat lunaire
Déluge séant Monceau de continent versé brisé d'impulsive magnificence
Le cristal force les pores du flanc resserre au feu les chemins trop longs
Au supplice abhorrant le pendu et la vermine imagine la caresse agenouillée de ton nom prononcé mais stérile
présageant les fèves énervées et l'avide festin d'une lassitude prosterné
S'arrache les fleurs en dispute de mauvaise véture impuissante au présage froid des pucelles d'aurore encor engourdies
Funeste le trouble gagne l'impudence
Marionnette avide d'une vigueur octroyant l'infaillible
Fend l'enveloppe l'ampoule frémissante au fond de sa
grotte épanouira toutes rosées de pierreries d'humeur
inaccessible
III
L'ire des ébauches éparses
Il serait moins fastidieux d'aller quérir pour Dame Nostalgie sombres mûres aux ronciers du pont que d'écrire un conte las de ses soupirs contraint à dissiper les gerçures du cœur
Las de ses soupirs il est sous la ramée au couvert des requêtes une ombre forgée par l'attente
Tel un fou j'allais me perdre en cette orée où nature pleure de voir à ses pieds la bouche rougie des sillons et l'encensée mais plus chasseresse peau des pâtures
Il n'était d'entrée ni de sortie mais un sourcil de pacte ; jouvencel fausset de croire à une limite
A chaque noce se glissait nocturne alliance il n'était peut-être même est-il nuit sans forêt ténébreuse élégie en ces fièvres négligées castel de nuit dans la rime des nuits obscur crachat en bouche d'amertume
Il n'est rien qui vaille les fougères de vent versées hors les gronderies du chêne à nos lèvres éprises
Enquis des brocards nous ne glanons des rencontres que fantasque minauderie et voguons répudiés sur des canaux mémoriaux
sans savoir si le messager apportera raillerie ou reconnaissancemais de fureur parmi les sources éparses nous établissions un commerce avec les pierres qu'amendaient nos magiques invectives
L'humide accentuel de l'oreiller emplit de vagues cieux astre et cœur
Le sable s'empourpre de captives rosées enlacé le cours d'eau pétri de démones la rébellion des racines
Boire d'une soif hantée secouée d'une détresse hurlante qui parviendra gorgée d'épouvante au visage furieux de la peste crépusculaire
Bâton d'ossement pour l'aveugle du jardin des refuges tremblent les épaules qui expirent de moelle leur rampante malédiction
Rebelle la déchirure a le pouls d'une aqueuse paupière vipère des tombes descellée ces rotules branlées que guettent les pairs gravissant
Les nuées de l'abîme froncent les oiseaux au délice blanchi des carcasses
Dédale reclus périlleux aride blotti en secrète moisson une félicité nocturne
Nos marches bleuissaient sous ces pénétrantes chenilles trainant en l'anneau d'un repaire qui nous faisait chuter
Brocards Risées au soleil les larmes répondaient comblaient les fissures confuses du fripon aux célestes cliquetis
Restait-il à l'amorce du sentier près du pont une reptilienne vêture de barque lapée - encore - de liserons éveillée par quelques fonçailles en dispersion
Par les bois je percevais une mer convulsive les narines possédées je conduisais mes rêves du globe à la tombe de la lune au glaive
Je déchirais les tentes et tombais du ciel
je conjurais flétrissais repos brouillard et mauve inclinée des ruines la voix d'une île une cave dégrafée de vignes exaucées
Tendue la montagne des invites fleurissait meurtrissante
Herse des lèvres balbutiantes l'encensoir ruisselle lugubre de chuchotis
Amer dans l'attente grelotte l'orage
L'approche s'étire falsifiée lavis colérique erreur délavée de liesse sans patrices l'âme ignare se colère de paître
Dans l'entremise d'une présence contournée quelques cendres corrigent le tison
Nous n'écrirons que des ravages mordurés et les fruits exhumés grimacent aux râles retrouvés
Passé l'univers
Dégoût d'une sente tuméfiée d'entrailles égosillée d'humeur
Le cimetière ébrèche les fastueuses noces des nuits alcoolées
Ébauches éparses
L'encre au collet de cette geste telle ces fols herbages en ce lieu de roches où la veille est à l'âge des lémures
Soue pastel des litières de l'ire
Je songe à une terre qui semble bien par des siècles lointains avoir été construite jusqu'aux cieux
Au regard jeté sur ces immenses tertres aucun doute ne subsiste
Pourtant effrangeant les nuances ne restent que des murets forts ordonnés enserrant des champs de rocailles
Mue vrillée de roulades en faction
à l'aval novatoire
phalanges crispées facies grigné
Tonnent les soieries sur l'épart des yeux et du masque
Perplexes les mains givrent de patience tordues vers ladolence d'une quiète chaleur
Chaque étoile expirante vibrante d'un mystèreen son ultime et lointain ricochet
éclairera l'esprit - d'un homme
perplexe de vivre
Elle parle la langueur de l'aurore avec ses litotes nées de l'émoi
Altière la lumière émeut et dévaste ce corps en creux et ses immanences
A l'image d'un sablier s'inverse la courbe alors d'un seladiré le sang dispose les prémices d'une rayonnante libation
Et le texte retercera les Ombres Erratiques.Patrice Thierry
L'Éther Vague (n° Dix ans d'âge), 1986
Tags : patrice thierry, l ether vague