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Touches au pavois (extraits)
il ne faut pas se fier aux apparences
dit-on
elle voilerait la véritémais l’apparence habille seulement la médiocrité
il n’y a rien derrière
elle est la seule existence* * *
des pans entiers de cruauté se détachent de la statue scellée à l’escalade tout en haut de la falaise
les petits hommes aux yeux ronds empilent des majuscules jusqu’aux nuages et les accrochent aux points de suspension
mais les lettres se mettent à pleuvoir tant et si bien que la colonne s’écroule au pied de l’échelle
écorchés à la racine des cheveux les gnomes tirent d’un cliché de crapule des images de Saint-Sulpice
à la tombée du jour ils clament à tout-va le vent et sur les écrans comme ils sont bons les fripons et de grande utilité
je ne sais en quel lointain ma pensée s’ébat quel sas aux essences de fête m’accueille et va s’ouvrir sur l’infini en isolant le monde
* * *
à merveille s’annonce la nouvelle saison
il y aura des engins nouveaux
César en tomberait raide
pensezcaresser Cléopâtre par-dessus la méditerranée
chasser le sanglier avec Astérix
filmer son propre assassinat sur les réseauxla nouvelle saison nous réserve des surprises
dans les caves où suintent le sang des esclaves
au sommet des gratte-ciel
bilboquets de ventres kamikaze
sur les mers souillées dans le verre de Neptunequi va chanter la guerre quand le monde sifflote ?
* * *
une simple fuite par une fente si fine que je l’avais prise pour un trait de crayon sur la page du nouveau jour
juste avant que ne se referme le livre
une ligne de fuite par où se sont évadées toutes les figures du zodiaque
sur le chemin qui gravit le mont Légat je trébuche sur la sacoche vide du facteur
j’aimerais être sûr que les lettres ont bien été distribuées glissées dans les fissures des murs et sauvées par le sable qui efface les fêlures du crâne
la prunelle décisive et la paupière en rideau
la caméra obscure où se projette la nuit
Claude-Lucien Cauët, Touches au pavois, APA 2020.
(p. 14 à 17)